Les œuvres de Guy Bigot rassemblées à la galerie TrES sont caractéristiques de sa seconde période. Tout en conservant la gamme chromatique de gris et de terre de sa période figurative, il évolue vers un « paysagisme abstrait »(1). Les rochers, les murs de granit, les sables du littoral deviennent, par un effet de zoom ou de découpe, les éléments d’une recomposition du paysage.
Cette technique proche du collage ne doit pas nous abuser : Guy Bigot illustre ce que chaque peintre pressent et expérimente : il n’y a pas d’abstraction, elle est prélèvement, épure, projection, mémoire (2). Chaque tableau projette sur la toile un paysage intériorisé et pourtant familier, procède d’un réalisme subjectif qui frappe par l’harmonie des compositions et la subtilité de la palette.
Plus largement, la peinture de Guy Bigot s’inscrit dans l’atmosphère d’après-guerre de réaction à l’abstraction géométrique, de « lassitude de la ligne droite et de l’angle aigu » (3) qui débouche sur un art d’intuition, lorsque le peintre découvre que « les remous de l’arbre et l’écorce de l’eau sont parents.. »(4). On pense, sans y voir de filiation, à la peinture d’Atlan ou de Camille Bryen.
Par-delà la variété des apparences dont les paysages des côtes bretonnes témoignaient dans sa période figurative, Guy Bigot parvient dans ces dernières œuvres à peindre le rythme même de la sensation et à en restituer la pulsation.
Galerie TrES, 3 rue Bossuet, 44000 Nantes, du 19 novembre au 9 décembre 2025.
(1 Dictionnaire Bénézit.
(2) On pense à Rothko qui, dans sa correspondance , déclarait : « j’ai toujours peint des temples grecs sans le savoir ». Mark Rothko, Ecrits sur l’art, Flammarion, 2005
(3) L’avant-garde au XXème siècle, Pierre Cabanne, Pierre Restany, André Balland, 1969
(4)Jean Bazaine, Notes sur la peinture d’aujourd’hui, Floury, Paris,1948.


